Chronologie relative : principes


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I Définition 

Le mot chronologie vient du grec « chronos » qui signifie « temps » et du mot « logos » qui signifie « sciences ». C’est la science des dates et des événements, plus précisément l’étude de la succession d'événements dans le temps.

Cette science est basée sur des objets géologiques qui témoignent d’une histoire. Il existe une relation d’ordre entre deux objets géologiques. En se basant sur le principe de l’actualisme, l’étude des objets géologiques et de leur position les uns par rapport aux autres permet de reconstituer l’histoire du passé.  On parle ainsi de chronologie relative. Cette science est basée sur des principes géologiques et paléontologiques.

II Les principes géologiques

Ils sont au nombre de 4 : principes de superposition, de continuité latérale, de recoupement et d’inclusion.

A/ Le principe de superposition 

Depuis l’existence des continents, depuis presque 3.8 Ga, des sédiments se déposent dans des bassins dits de sédimentation. Aujourd’hui, ces sédiments se retrouvent sous la forme d’empilements de couches de roches sédimentaires appelées couches ou strates.

Document 1 : Trois couches superposées :

Fichier: Principe-superposition.svg

Principe-superposition.svg par Frédéric MARBACH via Wikimédia Commons, CC-BY-SA-3.0-migré, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Principe-superposition.svg

Le principe de superposition des couches de sédiments indique que s’il n’y a pas de déformation depuis le dépôt de ceux-ci (ou très peu), alors on peut dire que toute strate est plus récente que celle qu’elle recouvre.

Document 2 : Strates sédimentaires non déformées, Vendée France :

©RS.2017

Document 3 : Strates sédimentaires peu déformées (Portugal) :

chaîne d'ardoise, Côte ouest, le Portugal

Source : Côte ouest, le Portugal, via pikist, Licence créative Commons,  https://www.pikist.com/free-photo-iomnj/fr

Dans le cas d’une forte déformation, les roches les plus anciennes ne vont plus se trouver à leur place de départ. Ici dans le cas d’un pli couché, elles vont se retrouver au cœur du pli (couche n°1 sur le document suivant).

Document  4 : Âge des couches de terrain dans un pli :


 

Document  5 : Couches renversées dans le cas d’un pli couché dans les Alpes :

©RS.2020

S’il y a eu beaucoup de déformations, il faut alors rechercher les critères de polarité de la couche et retrouver où se situait la base de la couche. Prenons l’exemple de ces couches de turbidites constituées d’une accumulation de grains de quartz et d’autres sédiments plus fins. Les grains les plus lourds se déposent en premier et se retrouvent donc à la base de la couche. 




 

Document  6 : Turbidite : 

Turbidite, ©RS.2019

Sur le terrain, si on observe une inversion de polarité des couches étudiées, cela signifie qu’il y a eu des mouvements tectoniques et que les couches ont été retournées, renversées. 

B/ Le principe de continuité latérale

Le principe de continuité latérale énonce que l’âge d’une strate est le même sur toute son étendue  même si les roches sont de natures différentes. En effet, l’érosion peut altérer la continuité des strates rocheuses sur de courtes ou longues distances. Quand il analyse la composition des strates, le géologue doit toujours étudier la strate du dessous (le mur) et la strate du dessus (le toit). Si sur un affleurement donné, plusieurs strates de même composition sont encadrées par un même mur et un même toit que sur un autre affleurement de nature différente, alors les strates étudiées sur les deux affleurements ont le même âge.

Prenons l’exemple du changement de faciès au niveau de la vallée de la Marne. Au nord du bassin parisien, au niveau de la butte Montmartre à Paris, on observe du gypse encadré par de la marne. Ces mêmes marnes encadrent plus au sud, vers Champigny, des couches de calcaire. 

Document 7 : Coupe simplifiée de la butte Montmartre :



 

Document 8 : Coupe de la vallée de la Marne :

Au niveau de la butte Montmartre, les marnes supérieures (supragypseuses) recouvrent une formation gypseuse divisée en trois masses par 2 lits marneux. Cela traduit la présence d’une lagune à forte évaporation donnant du gypse et alimentée par 2 fois par la mer.  


 

Document  9 : Mécanisme de dépôt de gypse dans une lagune :

Au sud du bassin parisien, les marnes supérieures recouvrent non pas du gypse mais un dépôt à faune d’eau douce : le calcaire de Champigny. Ainsi d’une rive à l’autre de la Marne, on passe d’un domaine lagunaire à un domaine lacustre. Le gypse de Montmartre et le calcaire de Champigny étant entourés du même mur et du même toit, on peut donc affirmer que ces deux strates bien que différentes sont nécessairement contemporaines. Le lit actuel de la Marne correspond ainsi à l’ancien rivage de la lagune.

C/ Le principe de recoupement 

Document 10 : Faille recoupant des couches de roches :

Fichier: Principe-recoupement.svg

Source : Principe-recoupement.svg , par Frédéric MARBACH via Wikimédia Commons, CC-BY-SA-3.0-migréhttps://commons.wikimedia.org/wiki/File:Principe-recoupement.svg

Le principe de recoupement indique que tout événement géologique qui en recoupe un autre lui est postérieur. Ici, la faille F affecte les strates 1 et 2 mais pas la strate 3. La faille est donc plus récente que la couche 2 mais plus ancienne que la couche 3.

Ainsi tout événement qui provoque un changement dans la géométrie des roches est postérieur à la dernière strate qu'il affecte et antérieur à la première strate non affectée. Cet évènement peut être une intrusion magmatique, une faille, un plissement, une discordance, une érosion.

Ainsi en étudiant les relations géométriques entre les strates, on peut les classer les unes par rapport aux autres.

Dans le cas du document suivant, l’âge du plissement est postérieur à la couche 3 mais est antérieur à la couche 4.

Document 11 : Plissement et disposition des couches :

©RS.2020

1. Exemple de la discordance angulaire :

Lorsque des couches horizontales reposent sur des couches plissées, on observe une zone de contact anormal entre ces deux ensembles : on parle de « discordance angulaire ». On parle de discordance car il y a une perturbation dans la succession des dépôts, une « discorde » liée à un changement de régime tectonique.

Document 12 : Discordance entre le micaschiste (dessous) et le niveau de dépôt du paléofleuve (cailloutis)

Visible sur la falaise de Pénestin, embouchure de la Vilaine, Bretagne :

Source : Discordance.jpg, Par Arlette1 via Wikimédia Commons, CC-BY-SA-3.0-migrated, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Discordance.jpg

En lieu et place de cet affleurement en Bretagne, il y a eu un premier épisode de dépôts de sédiments puis mise en place d’un régime tectonique de compression qui est à l’origine du plissement et de l’inclinaison des strates inférieures. Le pli est alors émergé et subit l’érosion. Puis de nouveau il y a un régime de sédimentation lié à la présence d’un fleuve permettant de nouveaux dépôts sédimentaires. Enfin le tout a été mis à l’affleurement.


 

2. Exemple des intrusions de magma :

Parfois on observe des injections de magmas qui recoupent des structures en place. On parle d’intrusion

Document 13 : Intrusion de magma :

File:Multiple Igneous Intrusion Phases Kosterhavet Sweden.jpg

Source : Multiple Igneous Intrusion Phases Kosterhavet Sweden.jpg par Thomas Eliasson of Geological Survey of Sweden

Via wikimedia commons, CC-BY-2.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Multiple_Igneous_Intrusion_Phases_Kosterhavet_Sweden.jpg

Sur cette photographie, on observe deux intrusions successives de magma dans un socle de granite. L’intrusion n°1 est de la pegmatite blanche (roche de composition granitique issue du refroidissement d’un magma granitique très différencié), et l’intrusion n° 2 qui recoupe le socle et la pegmatite, est une dolérite noire (microgabbro). 

Les intrusions magmatiques importantes se repèrent bien sur les cartes géologiques comme ici avec le pluton granitique de Flamanville en Bretagne. 

Document 14 : Extrait de la carte géologique de France au niveau de Flamanville :

Source : Géoportail


 

Légende :

Source : carte géologique de le France métropolitaine, BRGM

On remarque bien la forme sphérique du pluton granitique (symbole gamma couleur rouge) qui recoupe les couches sédimentaires (symboles k, s et d, couleurs vertes à marrons).  Les roches sédimentaires ont subi un métamorphisme dit « de contact » visible par des tirets sur la carte tout autour de la masse de granite. Au contact du magma chaud se mettant en place en profondeur, les conditions de températures des roches encaissantes changent et celles-ci se modifient à l’état solide. On observe ainsi autour du pluton une auréole de métamorphisme, c'est-à-dire une zone de roches modifiées par la chaleur tout autour de ce pluton.

Si ce pluton est visible aujourd’hui, c’est parce que l’érosion l’a mis à jour.  Ce pluton est plus récent que les couches sédimentaires au sein desquelles il se situe et dont la plus vieille date du Cambrien (k, ≈ - 540 Ma) et la plus récente du Dévonien (d, ≈ - 355 Ma). On peut donc affirmer que ce pluton s’est mis en place après le Dévonien puisqu’il les recoupe. Le pluton est recouvert en partie par des roches du Crétacé supérieur (C 7-4, jaune) datant d’environ 80 Ma. On peut donc dire qu’il s’est formé après le Dévonien puis qu’il a été érodé et enfin il a été recouvert par un milieu lacustre ou marin à l’origine des sédiments du Crétacé. Il a donc entre -355 Ma et -80 Ma. Cette chronologie relative est affinée par des méthodes physiques très spécifiques qui datent ce granite à environ -300 Ma. Il a été mis en place pendant l'orogenèse Hercynienne. Une orogenèse est une phase tectonique pendant laquelle une chaîne de montagnes se met en place.



 

D/ Le principe d’inclusion

Le principe d’inclusion dit que toute inclusion, à savoir tout objet emprisonné dans une strate est plus ancien que la structure qui l’entoure. 

Ainsi on trouve l’exemple des enclaves de Dunite dans les basaltes de coulées de lave. La Dunite correspond à un cumulat de cristaux d’olivine formé lors de la cristallisation fractionnée d’un magma issu d’une Lherzolite, péridotite du manteau. Lors d’une nouvelle arrivée de magma, celui-ci arrache des morceaux de la roche encaissante, ici la Dunite, et en emmène des morceaux en surface.

Document 15 : Enclave de dunite dans un basalte, Piton de la Fournaise, Ile de la Réunion :

©RS.2020



 

On peut aussi observer des inclusions minéralogiques. Tout minéral inclus dans un autre est forcément plus ancien. On peut l’observer ici avec ces cristaux de tourmaline qui sont inclus dans un cristal de quartz.

Document 16 : Cristaux de tourmaline inclus dans un quartz, Brésil :

©RS.2020


 

II Le principe d’identité paléontologique

Le faciès lithologique, c'est-à-dire l’ensemble des conditions géologiques ayant permis d’aboutir à une roche est peu fiable car il peut se répéter dans le temps et dépend fortement du milieu considéré. On ne peut donc espérer dater des évènements sédimentaires à partir de celui-ci. Il faut un marqueur irréversible du temps. 

L’évolution biologique est un processus continu, non répétitif et dont le cours est irréversible. Une espèce ne va pas brutalement revenir en arrière de son évolution ! L’évolution des espèces sert donc de chronomètre. Il existe dans une série de couches de roches sédimentaires, une variation verticale du contenu fossile ou contenu paléontologique. Les formes de vie évoluant, leur fossilisation permet de repérer les couches, appelées aussi strates, du même âge géologique. Une strate peut donc être définie, en plus de sa nature et de la structure de ses roches, par son biofaciès (ensemble des fossiles qu’elle renferme). La stratigraphie est l’étude des strates.

Document 17 : Série sédimentaire de Bidart (France)

Ainsi deux strates ayant le même contenu paléontologique, même en cas de différence de nature des roches, sont considérées du même âge.  

Dans ce principe, seuls les fossiles dits « stratigraphiques » sont utilisables. Ils répondent à ces critères bien précis :

  • ce sont des espèces qui présentent une grande abondance.
  • ce sont des espèces qui ont une courte durée d’existence, idéalement moins d’un million d’années. 
  • ces espèces doivent avoir une grande extension géographique par le fait que ce soit des espèces pélagiques capables de se disperser, permettant ainsi une corrélation entre strates à l’échelle du globe.

Les fossiles stratigraphiques sont bien souvent des espèces marines. 

Parmi les macrofossiles, les plus connus pour l’ère Mésozoïque sont les ammonites. Les espèces d'ammonites s'étant renouvelées très rapidement, elles ont eu une durée d’existence très courte. Par contre, elles occupent un vaste territoire géographique. Grâce à ces caractéristiques, les ammonites permettent une datation relative de terrains sédimentaires même à de très grandes distances. On peut citer par exemple l’espèce Hildoceras bifrons caractéristique  du Jurassique que l’on retrouve aussi bien en province nord-ouest européenne qu’en province méditerranéenne.

Ainsi si dans le sud de la France on trouve l’ammonite Hildoceras bifrons qui a une durée d’existence très courte, comme on la trouve également dans la Sarthe, alors on peut dire que cette espèce de fossile a une grande extension géographique et elle peut alors servir de fossile stratigraphique. 

Document 18 : Ammonite Hildoceras bifrons caractéristique du Jurassique:

File:Hildoceras bifrons Bruguière.jpg

Hildoceras bifrons Bruguière.jpg par Notafly via wikimedia commons, CC-BY-SA-3.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Hildoceras_bifrons_Brugui%C3%A8re.jpg


Les microfossiles sont aussi régulièrement utilisés car plus abondants et souvent planctoniques permettant ainsi une bonne dispersion. Ils permettent un découpage temporel beaucoup plus fin que les macrofossiles.

On peut citer par exemple, dans la famille des Globotruncannidés, l’espèce Globotruncana abathomphalus caractéristique de l’étage du Maastrichtien à la fin de la période dite du  Crétacé supérieur à la fin de l’ère Mésozoïque. Dans la famille des Globigérinidés, on peut citer l’espèce Eoglobigerina eobulloïdes caractéristique du Danien, premier étage du Paléogène, première période de l’ère Cénozoïque.

Document 19 : Foraminifère du genre Globotruncana observée à la loupe binoculaire (x20). 


Globotruncana3.png par PhilippeS13 via Wikimédia commons, CC-BY-SA-3.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Globotruncana3.png

Document 20 : Foraminifère du genre Eoglobigerina observée à la loupe binoculaire (x20). 

©RS.2020

On peut également définir des biozones, c'est-à-dire des zones de répartition pour une espèce donnée dans les roches sédimentaires. C’est une notion de stratigraphie qui décrit donc la répartition du fossile dans le sédiment.  Les biozones de répartition permettent de réaliser de la paléobiogéographie, c'est-à-dire retracer la position passée des continents (en plus du paléomagnétisme) et de mettre en évidence la dynamique des populations.

Document 21 : Reconstitution de la position des continents par Wegener

Fichier: Snider-Pellegrini Wegener fossile map fr.svg

Source : Snider-Pellegrini Wegener fossile map fr.svg, Par Osvaldocangaspadilla, Simon Villeneuve (traduction) , via wikimedia commons,  CC-BY-SA-3.0,2.5,2.0,1.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Snider-Pellegrini_Wegener_fossil_map_fr.svg

Ainsi en se servant des fossiles stratigraphiques ainsi que des biozones, il est possible de reconstituer une échelle représentant toutes les couches existant sur Terre. On parle d‘échelle stratigraphique.

 

Chronologie relative : principes - SVT - TERRE Term spé #1 - Mathrix

Date de dernière mise à jour : 01/06/2021