15 Cerveau, plaisir, sexualité

On appelle sexualité, l’ensemble des mécanismes physiologiques qui concourent au rapprochement des sexes ou à la reproduction de l’espèce. Chez l’être humain, c’est précisément l’ensemble des activités qui par l’union des sexes et le rapprochement des corps, aboutissent au plaisir physique et psychique, qu’il y ait désir de reproduction ou pas. 

1) Le contrôle hormonal de l'activité sexuelle

Chez les mammifères non primates, l’activité sexuelle n’est pas liée au plaisir mais uniquement à la finalité de reproduction. Elle est sous contrôle hormonal alors que chez les mammifères primates elle ne l’est pas totalement. En effet chez la rate, on observe une activité sexuelle accrue durant les heures précédant ou suivant l’ovulation et une  inhibition en dehors des périodes ovulatoires. 

Activité sexuelle de la rate :

Activite sexuelle rate

Source : Dissociation des activités sexuelles de la reproduction.png par Yohan Castel, via Wikimédia Commons,  CC-BY-SA-3.0, modifié par Sandra Rivière https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Dissociation_des_activit%C3%A9s_sexuelles_de_la_reproduction.png?uselang=fr

Chez la femme, on peut observer une activité sexuelle assez accrue avant l’ovulation. Chez les Bonobo mâles, une étude dans un zoo belge a montré que chez eux l’activité sexuelle non liée à l’accouplement à but reproductif augmentait proportionnellement au taux sanguin de testostérone. Les hormones opèrent donc bien un contrôle sur l’activité sexuelle des primates. 

Cependant chez la femme, mammifère primate, on observe une activité sexuelle continue et dissociée du cycle hormonal. 

Activité sexuelle de la femme :

Activite sexuelle femme

Source : Dissociation des activités sexuelles de la reproduction.png par Yohan Castel, via Wikimédia Commons,  CC-BY-SA-3.0, modifié par Sandra Rivière https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Dissociation_des_activit%C3%A9s_sexuelles_de_la_reproduction.png?uselang=fr

La castration des Bonobo mâles réduit leur activité sexuelle sans pour autant la supprimer et ce pas de manière immédiate mais au bout de plusieurs mois. Chez l’Homme, on peut citer le cas bien connu des castrats choisis par ces dames car avec eux,  il était possible d’avoir des rapports sans craindre de grossesse.

Le célèbre castrat Farinelli :

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Bartolomeo Nazari - Portrait de Farinelli 1734 - Collège royal de musique London.jpg photographie prise par Didier Descouens du tableau situé au Collège royal de musique, via wikimédia commons, CC-BY-SA-4.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Bartolomeo_Nazari_-_Portrait_of_Farinelli_1734_-_Royal_College_of_Music_London.jpg

Ceux-ci ont subi à l’âge de six ou huit ans une section du cordon spermatique contenant les nerfs et vaisseaux sanguins alimentant les testicules qui finissaient alors par disparaître. Or sans la testostérone produite par ceux-ci, les jeunes garçons ne développaient pas de caractères sexuels  secondaires. Ainsi la mue de la voix ne s’effectuait pas et ils conservaient une tessiture très étendue. Ils pouvaient cependant avoir des érections et des rapports sexuels. Cela induit donc un contrôle de nature autre qu’hormonal : un contrôle nerveux. 

2) Le contrôle nerveux de l'activité sexuelle

Chez l’homme l’activité sexuelle ne découle donc pas d’un comportement de reproduction mais d’un comportement dit « érotique » se traduisant par des activités variées (caresses, baisers,…) correspondant à des simulations de zones riches en terminaisons nerveuses dites « érogènes » car générant du plaisir. 


Le baiser de Rodin :

Le baiser d auguste rodin

Le baiser d'Auguste Rodin.jpg, par Rodin via Wikimedia commons, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Le_baiser_d%27Auguste_Rodin.jpg?uselang=fr

Le facteur majeur de l’apprentissage du comportement érotique correspond à la mise en jeu de mécanismes cérébraux impliquant un circuit appelé « circuit de la récompense ». 

Ce dernier fut mis en évidence par Skinner en 1938 mais localisé par hasard en 1950 par Olds et Milner. Ces derniers testaient le centre nerveux de la vigilance de rats. Ils leurs avaient implanté à  chacun une électrode dans l’hypothalamus afin de les stimuler et d’induire chez eux un comportement d’évitement de certaines zones de leur cage associée à des décharges électriques. Un rat a fait exception à la règle : au lieu de fuir les chocs électriques envoyés par les générateurs disposés à certains endroits de la cage,  ce dernier semblait les rechercher. Pour comprendre ce comportement hors norme, Olds le disséqua et découvrit que l’électrode de stimulation cérébrale n’était pas implantée dans l’hypothalamus mais dans le septum, une zone voisine. Il réalisa alors de nouveaux tests en implantant les électrodes dans ce septum. Il installa dans les cages une pédale génératrice d’impulsions ainsi qu’une gamelle contenant de la nourriture. À partir du moment où un rat activa par inadvertance la pédale, il constata que celui-ci délaissait sa gamelle, source de nourriture, au profit de l’activation de cette pédale génératrice d’impulsions dans le septum. Les rats appuyaient sans discontinuer et de manière compulsive sur la pédale et ce jusqu’à 6000 fois par heure. La stimulation électrique procurait plus de plaisir que l’assimilation de nourriture : Olds avait localisé une partie du système de récompense appelé également système de renforcement.

Expérience de Olds et Milner, 1950

Olds milner

Source : Sandra Rivière ©RS.2019

Dans le cerveau humain, ce circuit de la récompense fait intervenir plusieurs zones interconnectées. Le neuromédiateur de ce système est la « dopamine » appelée « molécule du plaisir ». Des zones du cerveau responsables de la mémoire (cortex préfrontal) sont également activées et nous avons alors tendance à reproduire les actions suivies d’une sensation de plaisir. Ainsi la vue d’un gâteau au chocolat identique à celui que notre grand-mère adorée nous faisait quand on était petit, nous fait saliver d’avance et nous donne envie de manger pour retrouver le plaisir ancré dans nos souvenirs. C’est également ce même circuit qui est impliqué dans la dépendance à l’alcool et à la nicotine ou encore aux drogues. Avec les techniques modernes (IRM) ce circuit dorénavant bien connu. Il démarre par l’aire tegmentale ventrale où confluent des informations d’autres régions cérébrales qui l’informent sur le niveau de satisfaction des besoins fondamentaux. Elle transmet ensuite cette information au noyau accumbens, au septum et à d’autres régions, ce qui aura un effet de renforcement sur des comportements permettant de satisfaire ces besoins fondamentaux. 

Système ou circuit de la récompense chez l’Homme :

Systeme de recompense schema general

Source : Système de recompense - Schéma général.jpg par lecerveau.mcgill.ca, via Wikimédia Commons, CC-BY-SA-3.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Syst%C3%A8me_de_recompense_-_Sch%C3%A9ma_g%C3%A9n%C3%A9ral.jpg?uselang=fr

3) L'influence de la société sur l'activité sexuelle

Ce renforcement sera influencé également par le contexte culturel et social. Dans une société, s’il existe une forte reconnaissance de l’hétérosexualité liée à une forte homophobie, les jeunes adolescents développeront de manière plus probable des scénarios hétérosexuels. Cela s’est observé en Allemagne du Nord à Hambourg dans les années 70, période de révolution sexuelle. A cette époque,  10 % des adolescents avaient alors des activités homosexuelles alors que 20 ans après ils n’étaient plus que 2 %. Cela s’est expliqué à l’époque par l’apparition du sida, la crainte du milieu homosexuel méconnu et les changements culturels.

Ainsi si l’identité sexuée correspond au fait de se sentir homme ou femme, d’être reconnu socialement comme tel(le), sa construction correspond à la résultante de l’interaction entre les facteurs biologiques, l’influence de la société et la capacité de l’individu et son désir d’être comme on attend qu’il soit. Ainsi l’individu peut être en accord ou en divergence avec cette norme imposée et/ou avec le sexe biologique qu’il possède, d’où le besoin pour certains de changer de sexe. On parlera dans ce cas de « transsexualisme » ou de « transgenre », c’est-à-dire le fait de se sentir femme dans le corps d’un homme ou de se sentir homme dans le corps d’une femme.

Laverne Cox, actrice transgenre américaine

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Laverne Cox à Paley Fest Orange est le nouveau Black.jpg, par

Dominick D, Via wikimédia commons, CC-BY-SA-2.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Laverne_Cox_at_Paley_Fest_Orange_Is_The_New_Black.jpg

Dans certains pays est reconnu un troisième sexe : ces individus ni hommes ni femmes, à la fois femmes et hommes possèdent les deux sexes incomplètement formés. En 2013 en Allemagne une loi est votée pour permettre l’enregistrement sous le sexe « indéterminé », des enfants dont les organes génitaux sont difficiles à définir comme masculins ou féminins. 

On peut citer comme autre cas particulier de genre, le cas des « Mahus » en Polynésie française encore nombreux au début du siècle dernier et moins aujourd’hui. Il s’agit d’hommes élevés dès la naissance comme des femmes. Ils devaient accomplir les tâches normalement dévolues aux femmes et pouvaient avoir une vie sexuelle et être en couple avec un homme ou une femme sans être considérés comme homosexuels. 

Le Sorcier d’Hiva ou Mahu

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Source :  Paul Gauguin - Le Sorcier d'Hiva Oa.jpg photographié par Ophelia2, via wikimédia commons, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Paul_Gauguin_-_Le_Sorcier_d%27Hiva_Oa.jpg

Aujourd’hui dans de nombreuses sociétés les rôles sexuels attribués à chacun des 2 sexes sont de plus en plus remis en question. En France les lois sur l’égalité des sexes soulignent cette évolution, brisant les stéréotypes le plus souvent dévalorisants pour le sexe féminin. 

Stéréotype de la femme dans les années 1950

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Femme au foyer année 1950 par ArtsyBee, via PIxabay, Pixabay Licence, https://pixabay.com/fr/illustrations/r%C3%A9tro-femme-au-foyer-famille-1321068/

De même les sociétés modernes reconnaissent de plus en plus la liberté à chacun de son orientation sexuelle qu’elle soit en lien ou pas avec son identité sexuée. On peut:

  • être un homme, se sentir homme et aimer un homme ou une femme, 
  • être un homme, se sentir femme et  aimer un homme ou une femme, 
  • être une femme se sentir femme et aimer un homme ou une femme 
  • être une femme, se sentir homme et aimer un homme ou une femme. 
  • se sentir asexué, c’est-à-dire n’appartenant à aucun sexe. 

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à gauche le symbole "transgenre"

source : https://svgsilh.com/fr/image/2417531.html

En France la loi Taubira de 2013 légalise le mariage entre deux personnes de même sexe. Il est également reconnu dans d'autres pays indiqués en bleu marine sur la carte ci-dessous :

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Lois mondiales sur l'égalité des mariages (à jour) .svg, par Kwamikagami, CC-BY-SA-4.0, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:World_marriage-equality_laws_(up_to_date).svg

L’article huit de la Convention européenne des droits de l’Homme reconnaît que l’orientation sexuelle est un élément constitutif de la vie privée et toute atteinte qui lui est portée est considérée comme une violation de celui-ci.

Schéma bilan : Les différents champs de la sexualité humaine

Sandra Rivière ©RS.2019

Schema sexualite humaine complet

 

Cerveau, plaisir, sexualité - SVT - SANTÉ 2nde #2 - Mathrix

Date de dernière mise à jour : 08/06/2021